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Intervention du 23/07/07

Le vrai rôle politique de l’Eurogroupe

La venue de Nicolas Sarkozy à Bruxelles ne constitue-t-elle pas la reconnaissance évidente de l’importance d’une vraie gouvernance économique pour construire l’Europe politique ? Il est temps d’aller plus loin dans la coordination des politiques économiques. Le traité réformateur, qui devrait voir le jour à la fin de l’année, fournirait une occasion efficace pour passer immédiatement à la vitesse supérieure.

Chronique publiée dans le journal La Tribune, le 23 juillet 2007

De la part d’un Président nouvellement élu, et investi d’un clair mandat de réformes, la participation à un Conseil des ministres des Finances européens, puis au sein de ce Conseil à l’Eurogroupe, doit être interprétée comme une marque du souci de prendre en compte les impératifs de gouvernance économique que suppose l’euro. Cette démarche inédite ouvre symboliquement la voie à une institutionnalisation du club des pays qui partagent la même monnaie, qu’est l’Eurogroupe. Certes, le but était aussi de faire admettre par les partenaires de la France l’éventualité d’un retard dans la réalisation de l’équilibre budgétaire promis pour 2010. Mais cet engagement in fine n’a pas été remis en cause. Et surtout, pour une fois, l’Europe n’a pas été prise comme bouc émissaire. Elle n’a pas été accusée d’être un corps de comptables aveugles imposant des contraintes injustifiées. Ce dialogue entre le Président français et l’Eurogroupe consacre au contraire la légitimité du Pacte de stabilité et de croissance en tant que moyen d’assurer la croissance à long terme à travers un minimum de convergences des politiques budgétaires nationales.

Il est toutefois temps d’aller plus loin dans la coordination des politiques économiques. L’Union monétaire est un acquis. Elle facilite considérablement le déploiement des activités des acteurs économiques sur le marché européen. Il est d’ailleurs inexact de prétendre, comme le font certains, que l’euro ne profite qu’aux grands groupes opérant sur ce marché. Chacun peut bénéficier des taux d’intérêt historiquement bas que la Banque Centrale Européenne a préservé, tout en s’attachant à la stabilité des prix, son « objectif principal ». Quant à l’appréciation de l’euro par rapport au dollar, les divergences auxquelles elle donne lieu entre une Allemagne qui y voit un signe positif de la bonne santé de l’économie européenne, et la France qui considère qu’elle recèle le danger d’accélérer la désindustrialisation, montre bien que le problème n’est pas si simple. Au demeurant, si les Etats le voulaient, ils pourraient fixer, comme le prévoit le traité européen, des orientations de politique de change vis-à-vis de la monnaie américaine. Or ils ne le font pas. Toutefois, chacun en est conscient : le remède à l’insuffisance de la compétitivité européenne ne peut être uniquement monétaire. C’est une Union économique et non pas seulement monétaire qu’ont envisagée les rédacteurs du traité de Maastricht et qu’il faut donc mettre en place. Les politiques de croissance et d’emploi ne peuvent plus en effet être exclusivement l’affaire des Etats. A vouloir enfermer dans un cadre purement national les outils budgétaires, fiscaux et sociaux, les Etats risquent de se heurter à des stratégies d’opérateurs économiques et financiers globaux les mettant de plus en plus en concurrence en exerçant d’autant plus de pression sur les systèmes sociaux et les salaires.

Sans transférer ces compétences au niveau européen, au moins devrait-on instaurer des procédures tirant les conséquences de l’interdépendance des économies européennes. Celle concernant les « déficits excessifs » est un premier pas. Elle est inspirée de la méthode communautaire : la Commission est seule à même de pouvoir recommander les mesures à prendre par les Etats défaillants, et le Conseil en décide à la majorité, sous peine d’amendes le cas échéant. La seconde étape pourrait être celle du renforcement des « Grandes Orientations des Politiques Economiques » adoptées par le Conseil pour coordonner les politiques des Etats membres. En principe, le respect de ces orientations fait l’objet d’une « surveillance multilatérale » et les Etats membres sont tenus de les respecter. Mais leur niveau d’engagement et d’effectivité est en réalité très limité.

C’est pourquoi, il serait bien plus efficace de saisir l’occasion du traité réformateur, qui devrait voir le jour à la fin de l’année, pour passer immédiatement à la vitesse supérieure : ce qui veut dire construire un programme économique et social opérationnel pour l’Europe. Formellement ce programme existe. Il s’agit de la Stratégie de Lisbonne. Mais sa conception devrait être entièrement revue. Jusqu’ici simple catalogue de bonnes intentions, elle met en lumière les points faibles de l’Europe et les priorités sur lesquelles tout le monde s’accorde dans la recherche, la formation et le développement technologique. Forte dans ses objectifs et faible dans sa concrétisation, elle devrait être la base d’une véritable gouvernance économique européenne. Il est évident que pour des pays qui, comme le Royaume Uni, ont choisi pour l’instant de rester en dehors de la zone euro, une telle gouvernance est inacceptable car elle ressemble trop à une centralisation des pouvoirs européens. En revanche, l’Eurogroupe est le mieux placé pour faire de l’Agenda de Lisbonne l’instrument privilégié – et contraignant - d’une gouvernance indispensable pour garantir la solidarité entre ses membres et les préparer à affronter, si besoin est, les chocs extérieurs. La venue de Nicolas Sarkozy à Bruxelles pourrait augurer favorablement d’une prise de conscience. Ne constitue-t-elle pas la reconnaissance évidente de l’importance d’une vraie gouvernance économique pour construire l’Europe politique ?

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